La bourse1 vit.
La bourse est en repli, cède, recule, baisse, chute, passe dans le rouge.
La bourse perd.
La bourse est bien orientée, repasse dans le vert, progresse, prospère.
La bourse gagne.
La bourse reste sur sa lancée, fait du surplace, marque le pas, piétine, trébuche, perd l’équilibre, recule, dérape, pique du nez, ralentit, grimpe, tombe, retombe, chute, rechute, revient à l’équilibre, franchit un cap, remonte la pente, se contracte, glisse, atteint son plancher, se redresse, bondit, rebondit, se replie, creuse l’écart.
La bourse avance, la bourse recule.
La bourse est secouée, malmenée, traverse une zone de turbulence, fait du yo-yo, des montagnes russes.
La bourse fluctue.
La bourse recule pour mieux sauter, franchit l’obstacle, s’essouffle, dévisse, part en vrille, plane, réduit la voilure, abandonne du terrain, passe à la vitesse supérieure, s’envole, plonge, replonge.
La bourse fait du sport.
La bourse est frileuse, attentiste, prudente, retranchée, incertaine, indécise, mitigée, partagée, en suspens.
La bourse hésite.
La bourse est affectée, anxieuse, préoccupée, fragile, inquiète, instable, nerveuse, perturbée, apeurée, à la peine, angoissée, pessimiste, optimiste, soulagée, turbulente, rassurée, satisfaite, heureuse, déçue, touchée, tétanisée, modeste, reste de marbre, broie du noir, n’a plus confiance.
La bourse a des sautes d’humeur, des états d’âme, des sentiments.
La bourse reçoit une estocade, prend un coup, accuse le coup, encaisse le choc, est volatile, mise à rude épreuve, se trouve dans la tourmente, flanche.
La bourse est dans une mauvaise passe.
La bourse est pénalisée, sanctionnée.
La bourse est victime.
La bourse est faible, fébrile, en petite forme, atone, apathique, anémique, léthargique, déprimée, en crise, paralysée, asphyxiée, mise sous oxygène, contaminée, sonnée, s’agite, s’essouffle, souffre, se dégrade.
La bourse est malade.
La bourse est en manque, sans direction, à la dérive, marche sur la tête, s’affole, panique.
La bourse est folle.
La bourse cherche son salut, retrouve la foi, espère.
La bourse croit.
La bourse est ingérable, incontrôlable, incorrigible.
La bourse est surveillée.
La bourse se stabilise, limite les dégâts, inverse la tendance, sort la tête de l’eau, évite le pire, retrouve sa vitalité, reprend du poil de la bête, a une bonne tenue, affiche ses couleurs, est en forme, s’en remet.
La bourse va mieux.
La bourse résiste, enregistre sa meilleure performance, débute l’année en fanfare, repart en trombe, redémarre sur les chapeaux de roue, a le sourire, est euphorique.
La bourse va beaucoup mieux.
La bourse tire son épingle du jeu, prend de la hauteur, refuse de perdre le contrôle, garde le pouvoir. 2
La bourse a sa dignité.
La bourse se garde de tout pronostic, fait fi des indicateurs, parie, anticipe, examine les options, fait la part des choses, sait bénéficier des effets d’aubaine, confirme ses objectifs, prend position, a des stratégies.
La bourse pense.
La bourse s’interrompt, suspend ses opérations, écourte la séance, ferme, ouvre, exprime ses exigences, impose ses demandes, attend, doit être attendue. 3
La bourse décide.
La bourse est corrigée, régulée, rassurée, relancée, soutenue, sauvée, soulagée, stabilisée, moralisée, purgée, renflouée.
La bourse est recapitalisée.
Non.
La bourse présente un bilan désastreux, est pourrie, putréfiée, en pleine débandade, en déconfiture, en faillite, gangrenée, massacrée ; elle capitule, s’écroule, s’effondre, agonise, se suicide, s’est volatilisée.
La bourse s’autodétruit.
La bourse, c’est,
la vie faite jeu
l’irresponsabilité faite système
l’incarnation de la loi - universelle - du profit
la pauvreté en perpétuel processus de fabrication
la planète en perpétuel processus de destruction
l’impensé, l’impossible de toute morale
l’aberration décidant du quotidien des six milliards de personnes vivant sur terre. 4
La bourse, c’est l’incarnation, la légitimation, l’exacerbation de tous les rapports de domination5, l’absurdité en sus.
La bourse doit disparaître. 6
La bourse, dont la seule existence suffit à délégitimer le libéralisme, c’est la mort.
14 janvier 2009.7